Longtemps réclamé par les entrepreneurs et les business angels, le compte entrepreneur-investisseur dessiné par Emmanuel Macron voit enfin le jour. Annoncé en novembre 2016 par Michel Sapin, le désormais baptisé « compte PME innovation » va permettre aux fondateurs de start-up et leurs investisseurs de financer plus facilement de nouvelles entreprises grâce aux plus-values de cession qu’ils auront réalisés.

Génèse du compte PME Innovation

Aujourd’hui, les fondateurs et business angels d’une start-up font face à une fiscalité lourde lorsqu’ils vendent leurs parts et réalisent des plus-values de cession. S’ils souhaitent réinvestir cette plus-value dans de nouvelles start-up, ils peuvent le faire soit directement, soit via une holding. Dans le premier cas, ils doivent s’acquitter de l’impôt sur le revenu, basé sur le montant de la plus-value, ce qui ne leur permet pas d’amortir d’éventuelles moins-values ultérieures. Dans le second cas, ils peuvent amortir une éventuelle moins-value, mais ils sont redevables de l’impôt sur la fortune pendant la durée de vie de leur investissement. Dans les deux cas, la fiscalité est très lourde et le risque pris important. Nombreux sont ceux qui sont alors tentés d’exiler leurs plus-values hors de France, vers des pays où la fiscalité est moins contraignante.

Le fonctionnement du compte PME Innovation

Afin d’inciter les entrepreneurs à succès et les business angels à financer et accompagner les jeunes start-up françaises, le gouvernement va mettre en place le compte PME Innovation, dans le cadre de la loi de finances rectificative de 2016. Grâce à ce compte, un entrepreneur ayant vendu son entreprise pourra réinvestir les plus-values de cette cession en les plaçant directement sur ce compte. Il ne sera redevable de l’impôt qu’à la sortie des fonds, permettant alors d’amortir les moins-values de cession potentiellement réalisées par ce nouvel investissement. La prise de risque sera moins importante, ce qui devrait convaincre un nombre important de fondateurs d’entreprise et de business angels à prendre part dans de nouvelles sociétés et d’apporter leurs expériences, savoir-faire et réseau. Un système dans lequel tout le monde y trouve son compte.

Les conditions du compte PME Innovation

A travers ce nouveau compte, le gouvernement entend favoriser les entrepreneurs et business angels qui investissent plus que des ressources financières. Pour pouvoir bénéficier du compte PME Innovation, les fondateurs des entreprises vendues devront en détenir au moins 10% des parts, et les business angels au moins 25%. Ils devront en plus s’engager à occuper un poste déterminant dans l’entreprise (être membre du comité stratégique, du conseil de surveillance, être administrateur ou avoir signé une convention d’accompagnement via laquelle l’investisseur s’engage à donner de son temps et de ses compétences gratuitement à l’entreprise).

Les limites et critiques de ce compte

Si l’annonce initiale de la mise en place du compte PME Innovation a été bien accueillie dans un premier temps, les conditions pour pouvoir en bénéficier laissent les entrepreneurs et les business angels sceptiques.

Avant la première relecture par l’Assemblée Nationale du Budget rectificatif de 2016, quelques points ont été mal accueillis par les entrepreneurs et business angels. Le pourcentage de détention d’une société pour pouvoir en placer les plus-values de cession dans le compte PME Innovation est très élevé.

Concernant les business angels, les Français financent rarement seuls, contrairement aux anglo-saxons. Les investisseurs français s’unissent plus largement en pool pour financer une même société. Dans plus de la moitié des cas, ils sont au moins 11 à investir conjointement dans un même projet (source). De plus, ils préfèrent souvent investir de plus petits montants dans un premier temps afin de pouvoir maintenir leur pouvoir dans le capital et n’être pas trop dilués lors des tours de table suivants. Ils n’ambitionnent pas tous non plus d’avoir un pouvoir de contrôle dans l’entreprise lors d’un premier investissement. Les contours de ce nouveau compte sont donc un peu éloignés de la réalité de l’investissement en France.

Les fondateurs et salariés de start-up, quant à eux, peuvent avoir consacré beaucoup de temps, d’énergie et de fonds personnel sans pour autant parvenir à détenir au moins 10% de leur entreprise. Ce pallier est discriminant financièrement alors que l’investissement personnel est colossal.

Les députés ont apporté une correction à ce biais lors de la relecture les 5 et 6 décembre 2016. Une dérogation est possible pour limiter les effets de seuils : si les investisseurs, groupement d’investisseurs et fondateurs de start-up ont signé au préalable un pacte d’actionnaire mentionnant la présence de chaque acteur dans un organe décisionnel leur permettrait de bénéficier des mesures du compte PME Innovation. Cette avancée rassure les business angels et salariés de start-up, même si le pacte d’actionnaire est loin d’être systématique lors du lancement de jeunes entreprises.

Par ailleurs, le texte ne prévoit pas encore de sursis d’imposition entre le moment où l’investisseur ou entrepreneur réalise sa plus-value de cession et son réinvestissement dans une nouvelle société. Ce point pose problème dans le sens où il peut y avoir un certain temps de latence, pendant lequel le futur investisseur doit pouvoir étudier plusieurs possibilités d’investissement, sans se ruer sur la première start-up venue dans la seule fin d’échapper au fisc. Cette critique n’a pas encore eu de réponse suite à la première relecture. Une seconde aura lieu très prochainement.

Adoption du texte définitif le 8 décembre 2016

Deux amendements ont finalement été adoptés concernant le CPI le 8 décembre 2016.

Une dérogation au seuil des 10% de détention de capital requis par les fondateurs de start-up pour pouvoir bénéficier du CPI a été adoptée. Si la valeur des parts vendues par les entrepreneurs représente 50% de leur patrimoine individuel, alors ils pourront bénéficier de l’avantage fiscal du compte PME Innovation, même sans détenir ce minimum de part de capital initialement requis.

Enfin, les business angels investissant en pool dans une même entreprise, ce qui est une réalité largement répandue, pourront également bénéficier des conditions du CPI. La revente des titres acquis dans un regroupement de type SIBA et la plus-value de cession sous-jacente pourra être réinvestie sans être imposée au préalable.

 

La concrétisation du compte PME Innovation est une bonne nouvelle pour les futures levées de fonds des jeunes pousses françaises, qui pourront bénéficier des ressources financières et extra-financières d’entrepreneurs et de business angels expérimentés. Les start-up ouvertes à l’investissement sur Sowefund ont besoin de ces ressources et sont éligibles au dispositif CPI, participez à leur aventure sur notre plateforme ! 

Découvrez nos start-up en financement

Tags: